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  • Writer's picturePatrick Maurus

édito avril 2024: Ces îles sont à nous


Revendications des iles Tokdo, Iodo et Inchon

© Camille Fourmeau


Rochers Liancourt / Tokdo


Le 27 janvier 1849, un navire baleinier français nommé Le Liancourt d’après François de La Rochefoucauld, duc de Liancourt, ‘découvre » deux rochers situés entre la péninsule coréenne et l’archipel du Japon. La présence de baleiniers, qui plus est français, n’est pas surprenante à l’époque. Beaucoup moins que celle de « baleines » qu’aurait aperçues par Nicolas Bouvier lors de sa visite à Chejudo. Selon une pratique courante de l’époque, le bateau laisse son nom aux îles, qui, comme bien des territoires ‘découverts », étaient nommés autrement par les autochtones et surtout connus !

Inhabités et inhabitables sans apports du continent, les Rochers Liancourt apparaissent dans des textes coréens et japonais depuis fort longtemps, sous des noms différents, qui témoignent en fait de l’incertitude de revendications incessantes des deux frères ennemis. Héréditaires : « En Corée, il semble que des textes anciens le nommaient Usando,et au Japon, Matsushima, des dénominations cherchant à prouver de chaque côté l’ancienneté de sa souveraineté. Le nom japonais, Takeshima, permet en Corée un jeu de mots coréen, car retourné, il donne ma-shi-ke-ta, autrement dit “ça a l’air bon”, preuve évidente de l’avidité des Japonais pour certains. » Dictionnaire des Cultures coréennes, Ellipses, 2024


Comme toujours dans ce genre de conflit, chacun trouve toujours un texte plus ancien que l’autre pour justifier sa position, texte qui ne prouve jamais grand chose, puisqu’une prise de position verbale autoritaire n’a de valeur que celle de la force de celui qui la prend. Toujours est-il que Japon et Corée(s) se balancent la patate chaude depuis des lustres, dans un conflit on ne peut plus mineur, relancé par le traité de San Francisco en 1951.


Couper l’espace maritime en deux sans tenir compte de ces rochers infertiles serait une solution tellement simple, trop simple pour des régimes qui n’ont cessé de jeter de l’huile sur le feu, illustrée par moult chansons nationalistes.

 

Iles d’Inch’ŏn


Une série d’îles en face d’Inchôn provoquent des affrontements bien plus graves, intercoréens, mais qu’y a-t-il de plus violent que des délires nationalistes. Il se trouve que les accords de l’armistice de 1953 n’ont pas réglé la question de la souveraineté sur les îles longeant le territoire nord-coréen au sud-sud-ouest. Et comme rien ou presque n’est venu depuis lors pour adoucir les moeurs, le tracé de la NLL (américain)  interdit de facto l’accès à la mer aux bateaux nord-coréens (un peu comme la Turquie en face des îles grecques, mais sans aucun lien historique). Là où de multiples solutions pacifiques ont été proposées au fil des ans, sans effet jusqu’à maintenant. Le Sud garde la haute main sur les eaux territoriales, calculées à partir des îles contestées (Yônpyông, Baekryông, Daechong). 

 

Iôdo 


Pour compliquer le tout, il faut aussi tenir compte des îles mythiques, comme Iôdo, quelque part dans la mer Jaune ou mer de Corée de l’Ouest. La légende voulait que les marins perdus en mer y trouvaient refuge. C’est le sujet, par exemple, de la novella de Yi Ch’ôngjun, Iôdo. Légende prise au sérieux, au point que Yi Sûngman (Syngman Rhee) ait un jour appelé les USA à l’aide sous prétexte d’une supposée invasion chinoise. Seule la demande répétée de ces derniers que la Corée du Sud fixe précisément l’emplacement de l’île d’Iô , ce qui était bien sûr impossible, pour que la crise se calme.

 

Une étendue de terre entourée d’eau


Pourquoi ne pas penser à un autre statut, puisque ni le statu quoi ante ni les face à face n’aboutiront jamais à rien. Les arguments n’ont pas changé depuis la division complète. Pourquoi ne pas donner à ces îles des statuts spéciaux, même innovants. Puisqu’aucune solution de petits pas n’est possible, pourquoi ne pas opter pour une solution idéale. Celle d’une gestion commune, ou d’une neutralisation, ou d’une exterritorialité. Là où les deux Corées de la péninsule pourraient tester une coopération sans danger, sans renoncer à aucune de leurs revendications actuelles.

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