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edito juillet 2025: Nouveaux divorces, nouveaux amis (1)

  • Writer: Patrick Maurus
    Patrick Maurus
  • Jul 11
  • 4 min read

Kim Jong-un et Vladimir Poutine, 13 septembre 2023. ©KCNA
Kim Jong-un et Vladimir Poutine, 13 septembre 2023. ©KCNA

La leçon semble claire, l’avenir serait au combat de géants entre USA et RP Chine (République populaire de Chine). Avec la Russie à l’arrière-plan et sans l’Europe (ici lamentations d’usage). La presse (généralisation douteuse en même temps qu’inévitable) nous le répète. La preuve en est que « les Chinois » vont « envahir Taïwan ». Un petit bémol, la nullité trumpienne, qui lorgne de façon tout aussi impérialiste sur ses voisins et impose ses règles à ses anciens ( ?) partenaires. La logorrhée habituelle sur le danger chinois / asiatique / oriental, souvent évoquée dans la revue tan’gun et sur revuetangun.com. Aussi ancienne que répétitive et génératrice éternellement réactivée de l’idée que Nous, c’est Ici, et que Eux, c’est Là-bas. Eux, qui construisent des armes, c’est dangereux. Nous, c’est normal. Eux, qui vendent quantité de produits, c’est dangereux. Nous, c’est normal. Danger, danger, danger. Un exemple entre dix millions, LCI, le 11 avril à 13h25, pour retenir les spectateurs pendant la pub : « On vous expliquera pourquoi il faut se méfier de Pékin plus que jamais. »


De quoi mourir d’ennui. Heureusement, il nous reste les Nord-Coréens ! Ceux que nous présentent nos télévisions ne nous décevront jamais, à moins que ce ne soient les télévisions elles-mêmes. La guerre en Ukraine vient de nous offrir un épisode original, variation sur le thème du danger nord-coréen, et preuve supplémentaire que le n’importe quoi est toujours d’actualité dès qu’on parle de RPDC (République populaire démocratique de Corée). Après la menace terrible permanente sur le Sud et le reste du monde, la recherche des soldats nord-coréens en Russie, nous avons eu droit à leur nullité sur le terrain. Contradiction ? Pour les mauvaises langues uniquement. Ces Nord-Coréens très méchants-très nuls nous ont offert un nouveau chapitre qui n’a conduit à aucune nouvelle analyse.


Bref, et on le savait quand même depuis longtemps, le rapprochement entre Russie et RPDC a complètement rebattu les cartes. Certes, mais comment. La paresse pousse à l’analogie avec le trio URSS-RP.Chine-RPDC, si souvent répétée qu’elle devrait sembler louche. Mais l’analogie URSS-Russie est utilisée tous les jours dans le cadre ukrainien. Pourtant, un tout petit peu de mémoire (ce qui implique d’avoir prêté attention à la question en son temps) devrait nous replonger dans les sinistres années de famine en Corée du Nord (au minimum 1995-2000). Il est aisé de comprendre qu’elles rappellent à chacun que ni les Russes (qui n’étaient plus soviétiques depuis un moment), ni les Chinois (dont seul le parti au pouvoir s’appelle encore communiste) n’étaient alors venus à leur aide. Ou alors de façon cosmétique. Ou bien tarifée. Mais certainement pas de façon humanitaires. Aucune analyse des mouvements actuels de région Pacifique ouest ne saurait faire abstraction de la mémoire des Nord-Coréens. Il est certainement impossible de penser à leur place, mais il est quand même possible d’imaginer les sentiments de ceux qui ont vu leurs gosses mourir de faim sous leurs yeux sans que les anciens camarades ne bougent le petit doigt… D’autant que la vox populi chez les voisins n’y a pas changé d’un iota dans son complexe de supériorité. Quelle marque de mépris plus forte que la sempiternelle comparaison entre Kim Il Sung et Mao qui a cours dans les rues de Yanji ou de Shenyang ? La mémoire est un outil de première importance pour les Nord-Coréens, du moins ceux qui ont eu accès à l’information éventuellement problématique. On pense à l’arrestation du businessman Wang Bin, officiellement en 2022, après beaucoup d’autres, officiellement pour corruption, ce qui donne à penser qu’il y a (aussi ?) une autre raison. Dans ce cas, il s’agirait d’une implication jugée excessive dans le développement économique du nord-ouest de la RPDC, autour de la ville portuaire chinoise de Dandong. De quoi pousser la RPDC un peu plus dans les bras de Poutine.


La Russie n’est évidemment pas la Chine, surtout pas pour des Coréens, mais ces derniers restent maîtres de leur politique extérieure, comme le montre la multiplication des gestes d’amitié éternelle entre le pays et la Russie. Le réalisme, voire le cynisme, sont d’actualité. La RPDC, courbée sous les sanctions des grandes âmes occidentales, même pendant la famine… sait parfaitement ce dont elle a besoin. Et la Russie est aujourd’hui le plus court chemin pour qu’elle puisse reconstituer le capital primitif qui lui manque tant. La RPDC qui a su, dans la douleur, finir l’aménagement de la zone touristique de Kalma, à Wonsan, et en terminer avec la reconstruction complète de la ville de Sinuiju et de l’arrondissement d’Uiju au bord du fleuve Amnok, (par la troupe de choc des Jeunes Héros de Paektusan pour les chantiers de réparation des dégâts dans la province du Phyong-an du Nord), sait parfaitement ce qu’il lui faut et ce qu’il lui faut faire. Déplacer des dizaines de milliers d’habitants sinistrés, les héberger à Pyongyang, rebâtir la ville de A à Z, rapatrier les habitants et relancer les activités et l’économie, tout cela pour un petit morceau du pays, cela coûte inévitablement très cher. Juste au moment où la Russie découvre le besoin qu’elle a des Coréens, leur rachetant des choses qu’elle pourrait en partie trouver au Sud. Alors pourquoi ? Le prix bien sûr, le niveau technologique moyen correspondant à une bonne partie de l’armement russe, et aussi des raisons politiques. Qui tiennent aux nouvelles attitudes russe et américaine.

 
 
 

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